CAMEROON
The new locomotive of Western Africa








Report

General Manager
Mr.Jean Williams Sollo.


Interview with:

Mr. Jean William Sollo,
General Manager

1er Février 2001
Question 1: Le Cameroun possède le deuxième massif forestier d'Afrique, représentant 40% du territoire national. Fort de ce constat, pourriez-vous nous rappeler les raisons qui ont conduit à la création de l'Onadef ?

Réponse 1: Comme vous venez de le mentionner, le Cameroun abrite le deuxième plus grand massif forestier d'Afrique Centrale, juste après la République démocratique du Congo. C'est une forêt dense qui représente environ 22 millions d'hectares. Cette forêt est importante à divers points de vues: économique, culturel, environnemental donc écologique et au niveau même de l'utilisation de l'espace rural. Les spéculations sont nombreuses sur un massif comme celui-là. Elles sont d'ordre forestier, agricole ou minier, voire urbain. Le développement veut que l'on organise tout cela dans un espace rural. D'où l'intérêt qui a été montré très tôt par les pouvoirs publics camerounais de mettre en valeur ce patrimoine forestier et de mettre en œuvre une planification de l'utilisation de ces territoires. Dans un premier temps, une carte a été établie représentant le plan d'utilisation de chaque partie du massif forestier. Sont indiquées les parcelles dédiées à l'exploitation forestière, celles qui seront réservées à la conservation de la bio diversité, celles qui seront converties en industries agricoles ou encore les endroits qui seront exploités pour leurs sous-sols. Afin d'en assurer la gestion, il était normal qu'un organisme comme l'Onadef soit créé.

L'Onadef a pour mission de proposer au gouvernement un plan d'utilisation de ce grand massif forestier. Après que ces propositions aient été adoptées, l'Onadef suggère au gouvernement les programmes de régénération de ce massif forestier lorsqu'il a été perturbé soit par l'exploitation forestière, soit par les utilisations illicites de parcelles désignées pour rester des forêts permanentes. Missions de planification, d'appui à l'aménagement forestier, de régénération et de reboisement ainsi que de soutien à la filière bois à savoir formation d'ouvriers capables de transformer le bois brut en produits finis, voilà pour les principales actions menées par l'Onadef.

Q. 2: Pour brosser un portrait chiffré de l'Onadef, voudriez-vous nous comuniquer le budget de votre organisme pour les deux dernières années ?


R. 2: Les budgets de l'Onadef pour ces trois dernières années ont été relativement faibles. Le pays traversant une crise économique assez grave, les programmes forestiers n'ont pas connu une augmentation budgétaire conséquente. Nous sommes donc passés d'un budget de 8 milliards de FCFA par an à une enveloppe annuelle de 2,5 milliards de FCFA en moyenne. Cette diminution budgétaire peut aussi se justifier par le fait que, pour tenir compte du programme de libéralisation de l'économie camerounaise, l'Onadef doit se restructurer pour ne se contenter que de missions d'encadrement pur et ne plus se charger des missions de production. La diminution de nos activités s'est accompagnée naturellement d'une diminution de notre budget. Cela ne reflète pas un manque d'intérêt de l'Etat au développement du secteur forestier mais une redéfinition des missions et des objectifs assignés à l'Onadef.

Q. 3: Quel type de partenariat seriez-vous susceptibles de rechercher, la restructuration de l'organisme une fois achevée ?


R. 3: Une fois notre restructuration actuellement en cours achevée, nous nous appliquerons à faire essentiellement du « contrôle technique » des aménagements forestiers, tout en restant impliqués en ce qui concerne le reboisement et la régénération forestière. A ce niveau là, il est possible que nous puissions chercher des partenaires. Pour deux raisons: la première est liée au problème de la capture dans l'air du carbone. Il faudrait mettre en place une grande campagne de reboisement qui permettrait aux arbres de capturer le carbone pour le transformer en oxygène. Ces programmes pourraient être développés avec des partenaires bilatéraux, multilatéraux voire privés qui s'intéressent aux problèmes de la protection ou de la conservation de l'environnement. Concernant les missions de « contrôle technique » de l'aménagement forestier, comme ce sont des missions d'Etat, des partenaires pourraient se joindre à nous mais resteraient assujettis à un contrat d'ordre purement administratif.

Q. 4: La production nationale de bois ronds se situe autour de 3,5 millions de m3 par an. En tenant compte des bois abandonnés, des bois non déclarés, on situerait les prélèvements annuels à 6 millions de m3. Que pensez-vous du plan d'action d'urgence sur la gestion durable des écosystèmes forestiers énoncé lors de la conférence qui s'est tenue du 25 au 29 septembre 2000 à Yaoundé ?

R. 4: Il est nécessaire de préciser que les chiffres que vous citez sont issus des exploitations forestières non durables, c'est à dire provenant de forêts non aménagées. Si nous parlons de l'aménagement forestier, ces chiffres doivent pouvoir augmenter. En effet, quand on exploite du bois, on enlève le bois mûr pour donner la possibilité aux jeunes arbres de se développer ou aux semis et graines de démarrer. En conséquence, à surfaces égales, nous devrions retirer beaucoup plus de bois que nous le faisons aujourd'hui. Dans le cadre du plan d'action d'urgence, si les aménagements forestiers sont encouragés, on pourrait tirer de la forêt camerounaise plus de bois qu'on en tire aujourd'hui sans en hypothéquer les capacités.

Q. 5: Qu'en est-il des bois non déclarés ? Est-ce une marchandise sur laquelle vous pouvez exercer un contrôle ?


R. 5: En effet, les bois non déclarés représentent une perte pour l'Onadef puisque notre organisme vit essentiellement des taxes forestières. Nous savons parfaitement qu'il existe des bois qui ne sont pas prélevés de façon légale et ces bois non comptabilisés nous pénalisent. Nous sommes d'ailleurs en train de prendre des mesures, à travers un plan d'urgence, pour que cesse cette exploitation illégale ou qu'elle soit réduite au minimum. Malgré cela, même s'il n'y a plus de bois exploité illégalement, les programmes d'aménagement forestier doivent permettre à la forêt camerounaise de produire plus de bois que ce qu'annoncent les chiffres officiels.

Il est maintenant difficile d'évaluer la quantité que représentent les bois non déclarés par rapport à l'exploitation totale de la forêt camerounaise. On peut par contre en expliquer les causes: suite à la crise économique, beaucoup d'opérateurs se sont déployés dans la forêt pensant y faire fortune, et les administrations s'occupant du contrôle forestier ne se sont pas suffisamment préparées pour pouvoir faire leur travail. Il est possible que les personnels ne soient pas suffisamment motivés notamment du point de vue financier pour faire correctement leur travail. Le phénomène de coupe illicite de bois est donc important et préoccupant. Si les mesures du plan d'action sont mises en œuvre, on pourra réduire la coupe illicite de bois de façon significative, ce qui serait bénéfique pour l'Etat ainsi que pour les populations rurales.
Q. 6: Concernant la mise en place de la politique pour la protection de l'environnement, travaillez-vous en coopération avec les industriels pour l'élaboration de zones protégées et le respect des principes établis au cours de la conférence de Rio ?

R. 6: La protection de l'environnement est en effet une préoccupation majeure du gouvernement et par conséquent d'instituts comme le nôtre qui sont chargés de la mise en œuvre de la politique gouvernementale en la matière. La protection de l'environnement est aussi une des raisons de notre restructuration: cela nous permettra de mieux coller aux principes de gestion durable des forêts donc de protection et de conservation. Notre soucis est de planifier l'utilisation du territoire, et par conséquent de tenir compte du développement économique et industriel ainsi que des préoccupations sociales légitimes des populations riveraines. La conférence de Rio est venue conforter un certain nombre d'actions entreprises par le gouvernement camerounais qui à son tour a adopté les résolutions édictées lors de la conférence. Nous sommes engagés dans cette stratégie de conservation et de gestion durable des forêts camerounaises avec la participation active des populations riveraines.

Q. 7: Pourriez-vous expliquer brièvement ce qui préside à la création de zones protégées ?

R. 7: Les zones protégées sont définies dans le cadre d'une concertation thématique avec les populations riveraines, les autres acteurs potentiels exploitant l'espace rural, agriculteurs, éleveurs, mineurs, pêcheurs. Nous faisons un inventaire des potentialités de la zone avant de se rendre compte qu'on y trouve une biodiversité intéressante à conserver ou à protéger. Nous travaillons en collaboration avec d'autres administrations pour définir s'il y a dans ces zones de l'or ou bien du pétrole ou bien si la construction d'un barrage est prévue, etc.… Tous ces paramètres une fois réunis, nous classons les zones en différentes catégories et parmi elles certaines seront des zones intégralement ou partiellement protégées. Auparavant, une expertise physique du terrain est menée pour déterminer quel statut doit être appliqué à la zone visitée et si nous devons conserver, protéger ou initier une conversion vers d'autres activités. Le gouvernement, un peu avant et à la suite de la conférence de Rio, a planifié l'utilisation de son territoire pour déterminer quelles étaient les activités adéquates.

Q. 9: Devant un tel potentiel, le rôle de l'Onadef semble primordial, pourtant en fin d'année dernière, certains analystes ont annoncé la mise en veille de votre organisme, voire sa suppression. Pouvez-vous nous confirmer aujourd'hui que l'Onadef a de beaux jours devant lui ?

R. 9: Ces mêmes analystes ont certainement pris conscience depuis de l'importance de notre organisme ! Nous avons reçu dernièrement un certain nombre de missions financées par la Banque Mondiale et notre ministère de tutelle. La conclusion est que l'existence de l'Onadef est totalement justifiée parmi les institutions forestières du Cameroun et qu'il convient de nous orienter vers sa restructuration pour tenir compte de la nouvelle philosophie libérale et de la nécessité pour l'Etat d'avoir un œil technique pertinent sur les activités du développement forestier. Je suis donc un Directeur Général serein !Q. 10: Parce que nos lecteurs s'intéressent toujours aux acteurs de l'économie d'un pays, voudriez-vous nous confier ce qu'a été votre parcours professionnel ainsi que les défis qui vous attendent dans les mois à venir ?

R 10: Pour évoquer le présent, je crois que vos lecteurs américains habitués à la flexibilité seront surpris quand ils verront que je suis Directeur Général de l'Onadef depuis déjà huit ans ! Quant au challenge, j'avoue qu'il est de taille: il y a dix ans, tous prédisaient la mort prochaine de l'Onadef. Des années après, l'Onadef est toujours là et renaît de ses cendres parce que nous avons pu démontrer que nous étions pertinents. Même les opérateurs économiques qui doivent se lancer dans l'aménagement forestier regrettent souvent que ce ne soit pas l'Onadef qui l'ait fait pour eux, car nous avons un savoir-faire. La plupart des plans d'aménagements qui ont été rédigés ces trois dernières années l'ont été à 70% par l'Onadef. Après avoir prouvé notre savoir-faire, notre challenge est aujourd'hui de vouloir contrôler les activités pour lesquelles nous ne sommes pas impliqués en tant qu'opérateurs. Mais comme nous ne voulons pas être juges et parties, nous ne contrôlerons pas des plans d'aménagement que nous avons nous même créés. Après notre restructuration nous n'aurons plus à rédiger de plans d'aménagement mais nous contrôlerons ceux des autres. Notre challenge est donc que l'Etat nous confie la mission de contrôle technique, le contrôle administratif et judiciaire restant l'affaire du Ministère de l'Environnement et des Forêts et éventuellement du Ministère de la Justice.

Ma carrière a commencé avec un programme de reboisement et de régénération forestière dans une petite localité du Cameroun. Une expérience qui nous permet aujourd'hui de savoir planter parfaitement 15 essences d'arbres sur les 20 actuellement exploitées, à des coûts peu élevés et en utilisant beaucoup de main d'œuvre. Ceci montre que le développement forestier est un formidable gisement d'emplois. Les programmes de lutte contre la pauvreté peuvent trouver des solutions dans la régénération et le reboisement des forêts. Trois ans plus tard, je me suis occupé au niveau central du contrôle technique des activités des autres projets de reboisement. Après cela, je me suis volontairement réorienté dans l'industrie en travaillant dans l'exploitation forestière et les usines de bois de la Sofibel à Belabo (Est du Cameroun) où j'ai été nommé Directeur d'exploitation. Puis, promu Directeur des Forêts au niveau de l'administration centrale, je suis devenu deux ans plus tard conseiller du Ministre de l'Agriculture puis de celui de l'Environnement et des Forêts. Enfin, j'ai après quelques années eu le privilège d'être nommé Directeur Général de l'Onadef fin 1993.



World Investment News Ltd cannot be made responsible for the comments of unedited transcriptions.


 Read on 

You can find the version published in Forbes Global or Far Eastern Economic Review

© World INvestment NEws, 2001. This is the electronic edition of the special country report on Cameroon published in Forbes Global Magazine, October 1st, 2001. Developed by Agencia E.